Avant de prendre le départ du Rally Monza, Grégoire Munster était, le week-end dernier, aux Canaries pour la dernière manche de l’ERC. Dans un rallye où les conditions n’ont cessé de varier, le pilote Hyundai s’est fait avoir. Retour avec lui sur son Rally Islas Canarias.
Tout d’abord, peux-tu nous parler de ta course ?
“Ça n’a pas été une très bonne course pour nous. On s’est fait piéger avec le choix de pneus le vendredi matin. Ça nous a fait perdre énormément de temps. On lâche aux alentours de 4 minutes parce qu’on était chaussé des pneus les plus durs. On s’est vraiment trompé. Le temps qu’on a perdu là, on n’a pas su le rattraper par après. Heureusement, on finit le rallye avec quelques chronos intéressants tout de même ce qui permet de positiver un minimum sur l’évènement. ”
Au Portugal et en Hongrie, tu nous parlais déjà de choix de pneus compliqués. Ça n’a pas été plus simple aux Canaries du coup
“En général, c’est toujours un peu la même chose pour ce qui est du choix des pneus. Maintenant, l’une des particularités des Canaries, c’est que c’est une ile. Du coup, la météo peut très vite changer. On l’a vu sur certaines spéciales où la route séchait très vite et d’autres où elle n’était pas totalement sèche. En plus, la pluie, même si elle ne tombait pas longtemps, pouvait être suffisante pour bien mouiller la spéciale. C’était donc très changeant. Surtout que la route pouvait également très vite sécher. C’est sur ça qu’on avait misé vendredi matin, mais ça n’a pas été le cas finalement.”
Est-ce que tu t’attendais à retrouver ce type de conditions ?
“Pour les Canaries, pas spécialement. On m’avait prévenu que ça pouvait arriver au mois de novembre. Maintenant, en 2019 quand on a roulé avec Opel Motorsport, on avait eu une édition complètement sèche. Il faisait même très chaud. Du coup, c’est sûr qu’on s’y attendait pas vraiment. Après, au fur et à mesure de la semaine, on a commencé à comprendre que ça allait être compliqué.”
Est-ce que c’est quelque chose que tu appréhendais avant le départ justement ?
“Ce n’était pas spécialement une appréhension. Personnellement, j’aime encore bien les conditions un peu compliquées. Je pense qu’on l’a montré avec quelques temps intéressants en fin de rallye. Mais, on peut vite se tromper et ça a été le cas ici. Maintenant, ça fait partie du rallye et en général j’aime bien ces conditions donc j’appréhendais pas tellement.”
Comment ça se passe dans la voiture à ce moment-là ?
“C’est sûr que c’est compliqué pour les nerfs. Dans chaque virage, on comprend bien que les autres qui sont chaussés d’un meilleur compromis vont évidemment perdre moins de temps. Du coup, ce n’est pas évident. Il faut essayer d’être efficace et de perdre le moins de temps possible. C’est ce qu’on a essayé de faire, mais avec les pneus qu’on avait, c’était vraiment très compliqué. On n’avait vraiment pas de grip et il fallait faire avec. A partir du moment où tu as fait ton choix de pneus en partant du service, tu sais que la météo peut changer. Quand on comprend qu’on n’a pas les bons pneus, il faut faire avec. On n’a pas le choix.”
Un choix complexe donc. D’autant plus qu’au service, il pouvait faire plein soleil et en spéciale y avoir de la pluie
“Exactement. C’est un peu sur ça qu’on c’était basé. Il avait pas mal plu et les routes étaient assez mouillées. Maintenant, entre-temps, il avait semble-t-il arrête de pleuvoir sur les spéciales. Au service, il faisait fort sec et donc on pensait que ça allait aller dans ce sens-là.”
Tu as souvent dit que tu n’avais pas de grip, alors que les Iles Canaries sont justement réputées pour ça. Est-ce dû au mauvais choix de pneus ?
“D’autres pilotes qui avaient, eux, des bons pneus, disaient aussi que le niveau de grip n’était pas très élevé. En fait, l’adhérence aux Canaries est très bonne sur le sec. Sur le mouillé, je ne sais pas exactement ce que ça fait sur l’asphalte, mais le grip est moins bon. Je ne dis pas qu’il est moins bon que ce qu’on retrouve chez nous en Belgique, mais, il n’est pas beaucoup plus élevé en tout cas. En règle générale, l’asphalte mouillé était tout simplement glissant comme ailleurs. Du fait qu’on ne soit pas chaussé des bonnes pneumatiques, évidemment, ça n’aidait pas vraiment. Ça avait même tendance à accentuer encore plus le problème.”
Malgré tout, tu as livré une très belle prestation face à Oliver Solberg tout au long de la saison. On imagine que tu espérais mieux que de finir deuxième du championnat Junior derrière lui
“C’est sûr que quand on est si proche du but, c’est un peu douloureux. Surtout qu’on se sentait capable de le faire. On aurait aussi voulu pouvoir se battre jusqu’au dernier mètre de la dernière spéciale. Ça s’est finalement joué assez rapidement après la première boucle. Nos chances avaient d’un coup été fort réduite pour le titre. De manière générale, ça reste quand même une bonne saison pour notre première année entière avec une R5. On est satisfait de notre saison, même si c’est un peu décevant quand on est si proche de l’objectif.”
C’est donc un bilan positif au terme d’un programme auquel tu ne t’attendais pas vraiment en février ?
“Oui, surtout qu’à la base on avait prévu de faire le Belgian Rally Championship et, éventuellement, quelques manches à l’international. Mais voilà, le championnat de Belgique a connu beaucoup d’annulations avec la situation. On est donc parti à Rome pour avoir du roulage après le confinement et la grosse pause un peu globale dans le monde du rallye. L’objectif était donc plutôt d’apprendre. Finalement, ça s’est développé et on finit troisième au général du championnat d’Europe. Quand on a commencé, à Rome, on avait ni cet objectif là, ni celui de faire tout le championnat. On peut donc être très satisfait de notre saison.”
Ton frère, Charles, était aussi au départ du Rally Islas Canarias. Comment as-tu trouvé sa prestation ?
“J’avoue que je n’ai pas vraiment tout su suivre en live. J’ai plutôt regardé par après. En début de rallye, il a fait un choix de pneus offensifs et qui n’a pas fonctionné. Il est un peu parti avec la même stratégie que nous. J’imagine donc que ça n’a pas dû le mettre fort en confiance au début du rallye. Au final, il s’en sort très bien avec, en plus, quelques temps intéressants. Puis, il a fait toutes les spéciales et tous les kilomètres, ce qui étaient son objectif principal. Il termine même sur le podium en ERC-3 Junior donc je pense que c’est mission accomplie pour Charles et Charlynne.”
Mardi, lors des tests, il est sorti assez violemment et tu étais, toi, dans la file d’attente pour prendre le départ. Comment l’as-tu vécu ?
“Au départ, on ne savait pas exactement qui était sorti car ça prend toujours un peu de temps d’avoir les informations. Du coup, quand j’ai appris que c’était eux, je savais aussi qu’ils étaient, tous les deux, en bonne santé et qu’ils n’étaient pas blessé. Après, ça fait toujours un peu bizarre quand c’est ton frère. Mais, à partir du moment où je savais qu’il allait bien, je ne me faisais plus trop de soucis à leur égard. Après, c’était plus pour ce qui concernait la voiture et, surtout, savoir s’ils allaient pouvoir prendre le départ ou non. Ce, pour justement prendre l’expérience qu’ils étaient venu chercher aux Canaries.”
Une histoire qui se finit donc plutôt bien
“C’est certain que quand on regarde les tests, ce n’était pas l’idéal du tout. Mais finalement, ils ont parcouru tous les kilomètres, ont bien appris et terminent même sur le podium en Junior. Mission accomplie donc. C’est ce qui était demandé avant de partir aux Canaries.”
Est-ce que tu as pu profiter du week-end pour lui donner quelques conseils ?
“En général, quand je repartais de l’assistance, il n’était toujours pas rentré puisqu’il y avait pas mal d’écart entre nous. Du coup, je n’ai pas eu l’occasion de le voir souvent pendant le rallye. Je lui ai plutôt donné des conseils avant pour bien se préparer.”
Revenons à toi maintenant. Tu seras à Monza, ce week-end, avec une i20 R5 de chez RedGrey. C’était une occasion à ne pas manquer ?
“Tout à fait. On a reçu l’opportunité de Hyundai Motorsport de rouler à Monza. On a évidemment accepté. Ça va être une superbe occasion de finir la saison en beauté et de prendre encore plus d’expérience. Ce sera aussi intéressant de rouler avec le team RedGrey. Je pense que c’est toujours important de rouler dans une autre équipe avec d’autres ingénieurs, d’autres mécanos et une vision différente. Ça fait aussi partie de l’apprentissage.”
Quel y sera ton objectif ?
“Il y a pas spécialement d’objectif précis. On ne joue pas le championnat en WRC-3. Ce sera aussi un rallye atypique avec ses spéciales sur le circuit et sur les routes de services annexes. Je ne sais donc pas trop à quoi on doit s’attendre. On a regardé les vidéos, mais ça ne nous est pas très familier. Pour nous, l’objectif sera donc de prendre un maximum de plaisir et essayer de faire le meilleur résultat possible pour terminer la saison en beauté. On va essayer de faire quelques temps intéressants et de se montrer en tête d’affiche en R5.”
Tu n’as pas peur des conditions qui sont annoncées là-bas pour le week-end ?
“Sur les spéciales sur le circuit, je pense qu’on retrouvera des conditions très froide, mais pas spécialement de verglas ou quoi. Par contre, quand on montra dans la montagne pour les chronos du samedi, là, il y a des risques d’avoir une météo un peu spécifique. On a vu les vidéos des tests de Thierry Neuville. On a pu observer qu’il se retrouvait parfois sur des portions comme au Monte-Carlo. Ça pourrait donc être intéressant.”
Ce sera un peu comme un Monte-Carl’ sur circuit en quelque sorte ?
“Ça pourrait. Maintenant, sur le circuit, comme j’ai dit, je ne pense pas. Dans les autres spéciales, il y a par contre de forte chance que ce soit le cas. Mais, je vais pas trop m’exprimer sur la météo parce que ça ne m’a pas trop réussi aux Canaries (rires, NDLR). Je vais plutôt attendre le dernier moment.”
Encore un tout grand merci à Grégoire Munster pour avoir pris de son temps pour répondre à nos questions.
Par Simon F
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